Aller au contenu principal

Confiance et reconnaissance

We are recognition hungers » 1

Éric Berne définit un Signe de Reconnaissance (appelé aussi “caresse” ou “stroke”) comme « tout acte impliquant la reconnaissance de la présence d'autrui »2.

Nous reconnaissons ainsi à l’autre le droit d’être parmi nous, de faire partie du groupe, d’être légitime.

Le signe de reconnaissance est plus qu’un besoin, c’est une nécessité. Une nécessité liée à notre identité sociale.

L’identité sociale naît de notre sentiment d’appartenance, et non l’inverse. Nous allons donc chercher des groupes et des communautés qui vont nous accepter en leur sein, et ainsi créer cette identité en nous conférant une estime de nous-même.

L’estime de soi est en lien avec la conviction de porter des valeurs et des capacités en lien avec la culture dans laquelle on évolue. Cette estime est donc naturellement le reflet des interactions que nous avons avec les groupes et communautés auxquelles nous appartenons.

L’estime de soi (autrement dit la valeur que nous accordons au reflet que nous renvoie le miroir du groupe – entreprise, collègues, etc. – dans lequel tout un chacun se regarde) s’est construite dans notre groupe d’appartenance primaire, puis elle a cheminé au gré des différents bains successifs dans les groupes d’appartenance secondaires.3

Et de cette estime que va se développer la confiance, état psychologique qui permet d’envisager l’avenir avec plus de sérénité.

Il y donc un lien fort entre les signes de reconnaissance et la confiance. La confiance en soi, mais aussi la confiance dans ses pairs et dans l’autorité.

Dans une entreprise, ces trois types de confiance vont permettre de développer et de maintenir la motivation.

Une personne qui a une forte capacité à s’évaluer (référence interne) aura besoin de moins de signaux extérieurs pour développer son estime et sa confiance.

La confiance va d’ailleurs nourrir cette référence interne, au point parfois, de couper le lien rationnel envers la critique ou les signes de divergence.

Éric Berne parle aussi des jeux qui se créent pour augmenter la réception de signes de reconnaissance. Par exemple, dans la relation avec certaines personnes, il y a comme un mini-cérémonial, une connivence validée par les deux protagonistes, qui permet de renforcer cette reconnaissance, et ainsi ce lien d’appartenance.

À l’excès, cette recherche forcée de signes de reconnaissance peut amener à ce que l’on appelle un Hyper4, un comportement de compensation qui sert à remplacer une attitude saine mais “interdite” dans le domaine de valeurs de l’individu.

Les signes de reconnaissance doivent donc être envisagés avec mesure et respect. Ils doivent répondre à une réalité particulière et non systématique.

C’est dans ces conditions que la confiance pourra se développer. Confiance en soi, confiance dans son équipe, confiance dans son manager.

Laurent Combalbert, négociateur professionnel au sein du RAID, définit quant à lui cinq confiances en entreprise :

La confiance en soi, la confiance d’équipe, la confiance hiérarchique, la confiance dans la mission et la confiance dans l’histoire.5

La confiance dans la mission se rapporte aux ambitions du projet et aux moyens qui lui sont attribués.

La confiance dans l’histoire est liée au vécu de situations similaires par l’entreprise et par le groupe d’appartenance.

Il ajoute que “l’incertitude est la règle”.

Il faut donc accepter la part d’incertitude qui résiste à notre volonté de maîtrise. Le doute fait partie de la vie professionnelle.

La confiance vient alors de la capacité à s’adapter aux événements inattendus.

La confiance, ce n’est donc pas l’absence d’incertitude. C’est l’assurance d’avoir des ressources nécessaires pour se confronter à des crises inopinées et à des événements inattendus.

Pour cela, l’équipe et la force de cohésion sont primordiales.

En période de crise, une « tectonique des enjeux »6 va mettre à l’épreuve l’engagement et la loyauté des coéquipiers. Les désaccords et la divergence d’opinion seront les sources d’une potentielle désunion. La confiance et l’Ego seront mis à l’épreuve.

Personne n'aime le conflit qui peut mettre à rude épreuve la confiance interpersonnelle. Pourtant, le conflit fait partie de la vie. L’important est qu’il soit maîtrisé.

L’objectif est alors de maintenir le conflit au niveau de la confrontation, et d'éviter qu’il ne se transforme en affrontement.

Cette nuance est importante. La confrontation se fait dans un contexte prédéfini, avec des règles et un arbitrage. L’affrontement quant à lui, dépasse les limites et sort du cadre. Il implique la violence et la perte de tout contrôle.

Pourquoi valider la confrontation ? Simplement parce que sans confrontation d’idées, les collaborateurs ne se sentent pas entendus. Ils ont l’impression que leur voix n’a pas la même valeur, qu’elle n’est pas respectée. Le sentiment d’équité est fortement amoindri. Et comme en parle Eric Berne, chaque situation d’injustice est un “timbre” de plus dans la collection de la victime. Et cette collection de timbres finira tôt ou tard, par s’exprimer de manière plus frontale, sous forme d’un affrontement.

Pour maintenir la confiance, il faut accepter la confrontation.

Quand la confiance est élevée, la vitesse augmente et le coût diminue.7

Dans toute entreprise, la compétence qui concentre le plus l’exigence de confiance est le leadership.

  • 1

    Berne, E. (1970). Sex in Human Loving, Simon and Schuster, New York

  • 2

    Berne Éric, Des jeux et des hommes. Psychologie des relations humaines, Paris, Stock, 1975

  • 3

    Diez Robert, Carton Pierre, « De la reconnaissance à la motivation au travail », L'Expansion Management Review, 2013/3 (N° 150), p. 104-112. DOI : 10.3917/emr.150.0104. URL : https://www.cairn.info/revue-l-expansion-management-review-2013-3-page-104.htm

  • 4

    diminutif de Hyperfonctionnement en thérapie neurocognitive et comportementale.

  • 5

    Combalbert, Laurent; Mery, Marwan. Les 5 leviers de la confiance (EYROLLES) (French Edition) . Eyrolles.

  • 6

    Combalbert, Laurent; Mery, Marwan. Les 5 leviers de la confiance (EYROLLES) (French Edition) . Eyrolles.

  • 7

    Covey, Stephen M.R.; Merrill, Rebecca. La Vitesse De La Confiance (French Edition) . Mango Media.